samedi 12 décembre 2015

Dans la peau d'un scribe


Par ce présent billet, je fais savoir que je suis encore en vie et que je vais bien. Je n’ai rien écrit ce dernier mois, j’en suis désolé! J’essaie de clore mon semestre; je prends l’avion ce mercredi vers Québec, et il me reste encore beaucoup à faire.
Je serai au Québec du 16 décembre au 6 janvier.
Qu’est-ce qui m’occupe en cette fin de session? Mon cours de critique textuelle
En fait, c’est le cours qui a occupé le plus clair de mon temps cet automne! Qu’est-ce que la critique textuelle? La critique textuelle c’est l’étude des copies manuscrites d’un document dont l’original est inconnu ou perdu, ayant pour but de déterminer les mots exacts de cet l’original. Le but de la critique textuelle du NT est de déterminer son texte original tel qu’écrit par ses auteurs. C’est un domaine d’étude essentiel, parce que la lecture de la Bible présume que son texte est fiable et fidèle à ce qui a été composé au 1er siècle. Dans environ toutes les bibles, il y a certains passages entre crochets "[....]" avec des notes en bas de page comme "certains manuscrits n'attestent pas le texte." La critique textuelle s'occupe de ces questions. 
Voici P46 (papyrus #46), la collection la plus ancienne des lettres de Paul (environ 200 AD). Il s'agit des premiers mots de Romains 12:1 ΠΑΡΑΚΑΛΩ ΟΥΝ ΥΜΑΣ ΑΔΕΛΦΟΙ ("Je vous encourage donc frères...") Vous pouvez voir que le mot υμας ("vous") est écrit au-dessus de la ligne. Le scribe a commis une petite inattention, a oublié d'écrire "vous," puis en se relisant il a corrigé son erreur.
Crédit Photo: CSNTM.org 
La problématique de la critique textuelle du NT, c’est que les originaux n’existent plus et qu’il existe des différences entre toutes les copies existantes, ce qui soulève la question : « comment détermine-t-on le texte original ? »
La problématique est multipliée par la montagne astronomique de données que nous avons : 5,635 manuscrits grecs, des dizaines de milliers de traductions anciennes (en latin, syriaque, copte, arménien, géorgien, éthiopien, gothique, etc.) et des millions de citations à l’intérieur des écrits des Pères de l’Église.
La tâche d’un critique est de naviguer au travers de cette pile de données et de reconstruire l’histoire de la transmission du texte du NT en choisissant la variante qui explique le mieux l’apparition des autres variantes.
Pourquoi ai-je désiré suivre ce cours qui semble atrocement pénible (ça pas juste l’air, ce l’est vraiment)? C’est dans un soucis de pouvoir répondre aux questions/commentaires comme :
·         « Quoi tu fais confiance à la Bible? Tout le monde sait que c’est une invention du 4ième siècle commandé par l’empereur Constantin! »
·         « Voyons donc la Bible, c’est comme le jeu du téléphone! Elle a tellement été copiée et traduite de fois qu’elle n’est plus du tout comme elle était au départ! »
Bref vous comprenez le principe. Ces accusations peuvent être troublantes quand on ne connait rien de ce domaine d’étude, mais de m’avoir plongé le visage dans des manuscrits variés et d’avoir étudié précisément l’histoire de la transmission du texte du NT, les méthodes de sa recomposition et ses documents historiques me permet d’avoir réponse à ses questions, ce qui est d’une grande utilité pour répondre aux questions des sceptiques et pour rassurer les croyants. C'est le genre de chose qu'un chrétien sur 1000 doit connaitre en profondeur :) .
J’écrirai sur ce sujet en détails dans le début de la prochaine année. Par la présente, je souhaitais seulement vous communiquer que j’étais en vie et que je n’ai pu écrire dans ce dernier mois précisément parce que le plus clair de mon temps était consacré à m’arracher les yeux sur différents manuscrits.
Ce à quoi ma vie ressemble ces jours-ci. Ça peut sembler assez étranger au monde pastoral, mais quelques personnes doivent être équipés pour répondre à ces questions, non? 

Nouvelles et requêtes de prière
·         J’ai 1 gros travail de critique textuelle à finir d’ici mardi soir et un examen d’hébreux mardi après-midi (je prends l’avion mercredi matin).
·         Passion, endurance, perspicacité!! AH! Observer les différences entre des manuscrits, ça contribue en effet à ma sanctification!
·         Pour un bon voyage de retour -> que je puisse témoigner, etc.

Merci de mes supporter, de me lire et de prier pour moi. J’ai bien hâte d’être au Québec et de vous voir!

Pour finir, voici une citation par l'un des plus grandes critiques textuelles du 20ième siècle, Bruce Metzger (d. 2007):
« La foi, l’espérance, l’amour, mais la plus grande de ces choses, c’est l’amour. » (1 Cor 13:13) 
[...]
"La foi nous met sur le chemin;
L’espoir nous fait continuer de marcher;
Et l’amour est ce que la vie chrétienne est entièrement à propos."
B.M. Metzger 

Marc-André Caron